III

DE LA CORRESPONDANCE DE

DE TOUS LES ORGANES ET DE TOUS LES MEMBRES

TANT INTERIEURS QU'EXTERIEURS DE L'HOMME

AVEC LE TRES-GRAND HOMME QUI EST LE CIEL

3624. Il est maintenant permis de rapporter et de décrire des choses merveilleuses qui n'ont encore, que je sache, été connues de personne, et ne sont pas même venues à l'esprit de qui que ce soit, à savoir, que tout le Ciel a été tellement formé qu'il correspond au Seigneur, à son Divin Humain ; et que l'homme a été tellement formé que, quant à toutes et à chacune des choses qui le composent, il correspond au Ciel, et par le Ciel au Seigneur : c'est là le grand mystère qui maintenant doit être révélé.

3625. De là vient que quelquefois, dans ce qui précède, lorsqu'il a été parlé du Ciel et des Sociétés Angéliques, il a été dit que ces Sociétés appartenaient à quelque Province du Corps, par exemple à celle de la Tête, ou de la Poitrine, ou de l'Abdomen, ou à celle de quelque Membre ou Organe de ces parties ; et cela, à cause de la Correspondance dont il était question.

3626. Qu'il y ait une telle Correspondance, c'est une chose parfaitement connue dans l'autre vie, non-seulement des Anges, mais aussi des esprits, et même des mauvais esprits ; par là les Anges savent ce qu'il y a de plus secret dans l'homme, et ce qu'il y a de plus secret dans le monde et dans toute la nature du monde ; j'ai pu très souvent le voir, même en ce que, quand je parlais de quelque partie de l'homme, ils connaissaient non-seulement toute la structure de cette partie, son mode d'action et son usage, mais encore bien d'autres choses qu'on ne saurait nombrer, et que jamais homme n'est capable d'explorer, ni même de comprendre ; et ils les connaissaient dans leur ordre et dans leur série ; et cela, d'après une inspection dans l'ordre céleste, qu'ils suivaient, auquel l'ordre de cette partie correspondait : ainsi, comme ils sont dans les principes, ils savent par là les choses qui en proviennent.

3627. Une règle commune, c'est que rien ne peut exister ni subsister d'après soi, mais que toute chose existe et subsiste d'après un autre, c'est-àdire, par un autre, et que rien ne peut être contenu dans une forme que d'après un autre, c'est-à-dire par un autre, comme on le voit d'après toutes et chacune des choses dans la nature : que le Corps humain soit par dehors contenu en forme par les atmosphères, cela est connu ; s'il n'était pas aussi par dedans contenu par quelque force agissante ou vive, il tomberait à l'instant en pièces : tout ce qui n'est point lié par un antérieur à soi, et au moyen des antérieurs par un Premier, périt à l'instant : que le TrèsGrand Homme, ou l'influx qui en provient, soit cet antérieur, par lequel l'homme, quant à toutes et à chacune des choses qui lui appartiennent, est lié avec le Premier, c'est-à-dire avec le Seigneur, c'est ce qu'on verra clairement dans ce qui suit.

3628. J'ai été instruit sur ce sujet par un grand nombre d'expériences, et j'ai même appris que non seulement les choses qui appartiennent au mental humain, c'est-à-dire à la pensée et à l'affection de l'homme, correspondent aux spirituels et aux célestes qui par le Seigneur appartiennent au ciel, mais qu'aussi dans le commun l'homme tout entier, et dans le particulier tout ce qui est dans l'homme, correspond de telle sorte qu'il n'y a pas la plus petite partie, ni même la moindre chose d'une partie qui ne corresponde ; et que c'est de là que l'homme existe, et que continuellement il subsiste : puis aussi, que si l'homme n'avait pas une telle correspondance avec le ciel, et par le ciel avec le Seigneur, ainsi avec un antérieur à lui, et par les antérieurs avec le Premier, il ne subsisterait pas même un moment, mais serait dissipé et anéanti. Il y a toujours deux forces qui contiennent ainsi qu'il vient d'être dit, chaque chose dans sa connexion et dans sa forme, à savoir une force agissant par dehors, et une force agissant par dedans, au milieu desquelles est la chose qui est contenue ; il en est aussi de même de l'homme, quant à chacune de ses parties, même les plus petites. Que ce soient les atmosphères qui au dehors, par une continuelle pression et de là par une force agissante, tiennent tout le corps en connexion, on le sait ; on sait aussi que l'atmosphère aérienne y tient par influx les Poumons ; que la même atmosphère y tient son organe, qui est l'oreille, avec ses formes construites pour les modifications de l'air ; que l'atmosphère éthérée agit de même pour les connexions intérieures, car elle influe librement par tous les pores, et tient inséparables dans leurs formes les viscères intérieurs du corps entier par une pression presque semblable, et de là par une force agissante ; et que cette même atmosphère y tient aussi son Organe, qui est l'OEil, avec ses formes construites pour les modifications de l'éther : si à ces forces ne correspondaient pas des forces internes, qui réagissent contre ces forces externes, et par conséquent qui continssent et missent en équilibre les formes intermédiaires, ces formes ne subsisteraient pas même un moment: il est donc évident qu'il doit y avoir nécessairement deux forces, pour que quelque chose existe et subsiste : les forces qui influent et agissent par le dedans viennent du Ciel et du Seigneur par le Ciel, et ont en elles-mêmes la vie. Cela est très-clairement manifesté par l'Organe de l'ouïe ; s'il n'y avait pas des modifications intérieures qui appartiennent à la vie, auxquelles correspondissent des modifications extérieures qui appartiennent à l'air, l'ouîe n'existerait pas ; il en est de même pour l'Organe de la vue ; s'il n'y avait pas une lumière intérieure qui appartient à la vie, à laquelle lumière correspondit une lumière extérieure qui appartient au soleil, la vue n'existerait nullement. La même chose se passe à l'égard de tous les autres Organes et de tous les Membres dans le Corps humain ; il y a des forces agissant par dehors qui sont naturelles, non vives en elles-mêmes, et il y a des forces agissant par dedans, vives en elles-mêmes, qui contiennent toute chose, et qui font que les choses vivent, et même selon une forme, telle qu'elle leur a été donnée pour l'usage.

3629. Que cela se passe ainsi, il est peu d'hommes qui puissent le croire, parce qu'on ne sait pas ce que c'est que le spirituel, ni ce que c'est que le naturel, ni, à plus forte raison, comment ils ont été distingués entre eux, ni ce que c'est que la correspondance, ni ce que c'est que l'influx, et parce qu'on ignore que le spirituel, lorsqu'il influe dans les formes organiques du corps, présente les opérations vives telles qu'elles apparaissent ; et que, sans un tel influx et sans une telle correspondance, il n'y a pas une seule partie du corps, même la plus petite, qui puisse avoir la vie et être mise en mouvement : j'ai été instruit, par vive expérience, de quelle manière ces choses se passent ; j'ai su que non seulement le ciel en général influe, mais aussi les sociétés en particulier ; quelles sont et ce que sont les sociétés qui influent dans tel ou tel organe du corps, et dans tel ou tel membre du corps ; qu'il n'y a pas qu'une seule société qui influe dans chaque organe ou dans chaque membre, mais qu'il y en a un très-grand nombre et que dans chaque société, il y a aussi un très grand nombre d'individus car plus le nombre en est grand, meilleure et plus forte est la correspondance, parce que la perfection et la force dépendent de la multitude unanime d'individus qui font un dans une forme céleste ; de là résulte dans chaque partie un effort plus parfait et plus puissant selon qu'il y a un plus grand nombre.

3630. Par là, j'ai pu voir que chacun des viscères et des membres, ou des organes du mouvement et des sens, correspond à des sociétés dans le ciel, qui sont comme autant de cieux distincts, et que de ces cieux, c'est-à-dire par ces cieux, influent les célestes et les spirituels chez l'homme, et même dans des formes adéquates et convenables, et présentent ainsi les effets qui se font voir à l'homme ; mais ces effets ne se font voir à l'homme que comme naturels, ainsi tout à fait sous une autre forme et sous une autre apparence, au point qu'on ne peut pas connaître qu'ils viennent de là.

3631. Il m'a aussi été montré une fois, absolument d'une manière vivante (ad vivum), quelles sont et ce que sont les sociétés, et comment influent et agissent celles qui constituent la province de la face, et y influent dans les muscles du front, des joues, du menton et du cou, et comment ces sociétés communiquent entre elles ; et afin que cela me fût présenté d'une manière vivante, il leur était permis de faire l'effigie d'une face de diverses manières par influx : il m'a pareillement été montré quelles sont et ce que sont les sociétés qui influent dans les lèvres, dans la langue, dans les yeux, dans les oreilles ; et il m'a aussi été donné de converser avec elles, et d'être ainsi pleinement instruit. Par là j'ai pu voir que tous ceux qui viennent dans le ciel sont organes ou membres du Très-Grand Homme ; et aussi que le Ciel n'est jamais clos, mais que plus les sociétés sont nombreuses' plus puissant est l'effort, plus grande est la force, et plus vigoureuse est l'action ; et qu'enfin le Ciel du Seigneur est immense, et tellement immense qu'il surpasse toute croyance ; les habitants de cette terre sont en très petit nombre relativement, et à peu près comme un lac relativement à l'Océan.

3632. L'Ordre Divin, et par suite l'ordre céleste, ne se termine que chez l'homme, dans ses corporels, à savoir dans ses gestes, dans ses actions, dans les traits de sa face, dans son langage, dans ses sensations externes et dans les plaisirs de ces sensa-
-tions ; ce sont là les extrêmes de l'ordre, et les extrêmes de l'influx, qui alors sont finis ; mais les intérieurs qui influent ne sont pas tels qu'ils se présentent dans les externes, ils sont absolument d'une autre face, d'une autre physionomie, d'une autre sensation et d'une autre volupté ; les correspondances enseignent quels ils sont ; puis aussi, les représentations dont il a été traité. Que les intérieurs soient autres, on peut le voir par les actions qui découlent de la volonté, et par les paroles qui découlent de la pensée ; les actions du corps ne sont pas telles dans la volonté, et les expressions du langage ne sont pas non plus telles dans la pensée : par là il est même évident que les actes naturels découlent des spirituels, car les choses qui appartiennent à la volonté et celles qui appartiennent à la pensée sont des spirituels ; et que les spirituels sont en effigie dans les naturels d'une manière correspondante, mais toutefois autrement qu'ils ne sont en eux-mêmes.

3633. Tous les Esprits et tous les Anges apparaissent comme hommes, avec une face et un corps d'homme, avec des organes et des membres, et cela parce que leur intime conspire pour une telle forme: de même le primitif de l'homme, provenant de l'âme du père, tend avec effort à la formation de tout l'homme dans l'œuf et dans l'utérus, quoique ce primitif soit non dans la forme du corps, mais dans une forme très parfaite connue du Seigneur Seul: et comme l'intime pareillement chez chacun conspire pour une telle forme et y tend avec effort, voilà pourquoi là tous apparaissent comme hommes. Et en outre, tout le Ciel est tel que chacun est comme le centre de tous, car il est un centre d'influx par la forme céleste provenant de tous ; de là l'image du ciel rejaillit dans chacun, et le fait semblable à elle, par conséquent homme ; en effet, tel est le commun, telle est la partie du commun, car les parties doivent être semblables à leur commun, pour qu'elles appartiennent à ce commun.

3634. L'homme qui est dans la correspondance, c'est-à-dire qui est dans l'amour envers le Seigneur et dans la charité à l'égard du prochain, et par suite dans la foi, est par son esprit dans le ciel, et par son corps dans le monde ; et comme ainsi il fait un avec les Anges, il est aussi, lui, une image du ciel ; et comme il y a influx de tous ou influx du commun dans chacun ou dans les parties, ainsi qu'il a été dit, cet homme est aussi, lui, un petit ciel sous une forme humaine ; car l'homme a, d'après le bien et le vrai, ce qui fait qu'il est homme, et distinct des animaux brutes.

3635. Il y a dans le corps humain deux choses qui sont les sources de tout son mouvement, et même de toute action et sensation externe ou purement corporelle, à savoir, le Cœur et les Poumons ; ces deux choses correspondent au Très-Grand Homme ou au Ciel du Seigneur d'une telle manière que les Anges Célestes y constituent un Royaume, et les Anges Spirituels un autre Royaume, car le Royaume du Seigneur est Céleste et Spirituel ; le Royaume Céleste est composé de ceux qui sont dans l'amour envers le Seigneur, et le Royaume Spirituel de ceux qui sont dans la charité à l'égard du prochain, n° 2088, 2669, 2715, 2718, 3235, 3246 ; le Cœur et son Royaume dans l'homme correspondent aux Célestes, le Poumon et son Royaume correspondent aux Spirituels ; ces célestes et ces spirituels influent aussi dans les choses qui appartiennent au Cœur et aux Poumons, au point que ces choses aussi existent et subsistent par l'influx qui en provient ; mais, d'après la Divine Miséricorde du Seigneur, il sera traité en particulier de la Correspondance du Cœur et des Poumons avec le Très-Grand Homme.

3636. Le point le plus universel, c'est que le Seigneur est le Soleil du Ciel, et que de là provient toute Lumière dans l'autre vie ; que rien absolument n'apparaît d'après la lumière du monde aux Anges et aux Esprits, ou à ceux qui sont dans l'autre vie, et que la lumière du monde qui provient de notre soleil n'est que d'épaisses ténèbres pour les Anges : du Soleil du Ciel ou du Seigneur procède non seulement une Lumière, mais aussi une Chaleur ; mais c'est une Lumière spirituelle et une Chaleur spirituelle ; la Lumière devant leurs yeux apparaît comme lumière, mais elle a en soi l'intelligence et la sagesse, parce qu'elle en procède ; la Chaleur est perçue aussi par leurs sens comme chaleur, mais en elle est l'amour, parce qu'elle en procède ; c'est pour cela même que l'amour est appelé Chaleur spirituelle et est aussi la chaleur de la vie de l'homme, et que l'intelligence est appelée Lumière spirituelle, et est aussi la lumière de la vie de l'homme : de cette correspondance universelle dérivent toutes les autres, car toutes choses en général et en particulier se réfèrent au bien qui appartient à l'amour, et au vrai qui appartient à l'intelligence.

3637. Le Très-Grand Homme est tout le Ciel du Seigneur respectivement à l'homme, mais le Très-Grand Homme dans le sens
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vient le Ciel, et à Lui correspondent toutes les choses qui y sont. Comme le Genre Humain, par la vie du mal et de là par les persuasions du faux, était devenu entièrement pervers, et comme alors chez l'homme les inférieurs commençaient à dominer sur ses supérieurs, ou les naturels sur ses spirituels, au point que Jéhovah ou le Seigneur ne pouvait plus par le Très-Grand Homme, c'est-à-dire par le Ciel, influer ni remettre ces choses dans l'ordre, il en résulta la nécessité de l'avènement du Seigneur dans le monde, pour revêtir ainsi l'humain, et le faire Divin, et par là rétablir l'ordre, afin que tout le Ciel se référ‚t à Lui comme à l'homme Unique, et correspondit à Lui Seul, après que ceux qui étaient dans le mal, et par suite dans le faux, seraient rejetés sous les pieds, ainsi hors du Très-Grand Homme : de là ceux qui sont dans les cieux sont dits être dans le Seigneur, et même dans le Corps du Seigneur, car le Seigneur est le tout du ciel, en Qui tous et chacun y obtiennent provinces et fonctions.

3638. De là vient que, dans l'autre vie, toutes les sociétés, tout autant qu'il y en a, tiennent leur situation constante par rapport au Seigneur, Qui apparaît comme Soleil à tout le ciel ; et, ce qui est merveilleux, et pourra à peine être cru de quelqu'un parce que ce ne saurait être compris, c'est que les sociétés y tiennent la même situation par rapport à quiconque est dans le ciel, en quelqu'endroit qu'il soit, et de quelque côté qu'il se tourne et se retourne, de sorte que les sociétés qui apparaissent à sa droite sont constamment à sa droite, et celles à sa gauche constamment à sa gauche, quoique lui-même change les places quant à sa face et à son corps : il m'a aussi été très souvent donné de le remarquer en tournant le corps : de là, il est évident que la forme du ciel est telle qu'elle représente constamment un Très-Grand Homme respectivement au Seigneur ; et que tous les Anges sont non seulement chez le Seigneur, mais dans le Seigneur ou, ce qui est la même chose, que le Seigneur est chez eux et en eux autrement cela n'existerait pas ainsi.

3639. Toutes les situations dans le ciel sont par suite déterminées par rapport au corps humain selon les plages d'après lui, c'est-à-dire à droite, à gauche, devant, derrière, dans quelque position qu'il soit, comme aussi selon les plans, par exemple, le plan de la Tête, des parties de la tête, telles que le front, les tempes, les yeux, les oreilles ; le plan du Corps, par exemple le plan des épaules, de la poitrine, de l'abdomen, des lombes, des genoux, des pieds, des plantes des pieds ; puis aussi, au-dessus de la tête et au-dessous de la plante des pieds, en toute direction oblique ; même par derrière depuis l'occiput jusqu'en bas : par la situation elle-même, on connaît quelles sont les sociétés, et à quelles provinces des organes et des membres de l'homme elles appartiennent, et jamais on ne s'y trompe ; mais on les connaît davantage par leur génie et leur caractère quant aux affections.

3640. Les Enfers, qui sont en très grand nombre, ont aussi une situation constante , au point qu'on peut, d'après la situation seule, savoir quels ils sont, et ce qu'ils sont ; quant à leur situation, il en est de même ; ils sont tous audessous de l'homme dans des plans dirigés en tout sens sous les plantes des pieds : quelques esprits infernaux apparaissent aussi au-dessus de la tête, et ailleurs çà et là ; mais ce n'est pas qu'ils y aient leur situation, car c'est une fantaisie persuasive qui fait illusion et simule la situation.

3641. Tous, tant ceux qui sont dans le ciel que ceux qui sont dans l'enfer, apparaissent droits, la tête en haut et les pieds en
bas ; mais néanmoins en eux-mêmes et selon la vue angélique ils sont dans une position différente, c'est-à-dire que ceux qui sont dans le ciel ont la tête tournée vers le Seigneur, qui là est le Soleil et ainsi le Centre commun d'où dépendent toute position et toute situation, tandis que les esprits infernaux devant la vue angéligque sont la tête en bas et les pieds en haut, ainsi dans une position opposée, et aussi dans une direction oblique ; en effet, ce qui est en haut pour les célestes est en bas pour les infernaux, et ce qui est en bas pour les célestes est en haut pour les infernaux. Par là on voit à peu près comment le ciel peut pour ainsi dire faire un avec l'enfer, ou comment ils peuvent ensemble présenter une unité en situation et en position.

3642. Un matin j'étais en société avec des Esprits Angéliques, qui, selon la coutume, faisaient un en pensant et en parlant ; leur conversation pénétrait aussi vers l'enfer, dans lequel elle était continuée, au point que les esprits infernaux semblaient faire un avec eux ; mais cela consistait en ce que le bien et le vrai que prononçaient les Anges étaient changés par un renversement étonnant en mal et en faux chez les infernaux, et cela par degré à mesure que la conversation parvenait où l'enfer faisait un par les persuasions du faux et les cupidités du mal : quoique les enfers soient hors du Très-Grand Homme, ils sont cependant toujours de cette manière pour ainsi dire ramenés à l'unité, et par là tenus dans l'ordre selon lequel sont établies leurs consociations ainsi le Seigneur d'après le Divin gouverne aussi les enfers.

3643. J'ai observé que ceux qui sont dans les cieux sont dans une aure (aura) sereine de lumière, comme celle de la lumière du matin et du midi, même déclinant au soir ; et que pareillement ils sont dans une chaleur comme celle du printemps, de l'été et de l'automne; mais que ceux qui sont dans l'enfer sont dans une atmosphère épaisse, sombre et ténébreuse, comme aussi dans le froid : j'ai observé qu'entre ces choses dans le commun il y a équilibre ; puis aussi, qu'autant les Anges sont dans l'amour, la charité, et par suite dans la foi, autant ils sont dans une aure de lumière et de chaleur printanière ; et qu'autant les infernaux sont dans la haine et par suite dans le faux, autant ils sont dans l'obscurité et dans le froid: dans l'autre vie, la Lumière, comme il a déjà été dit, a en soi l'intelligence, la Chaleur a en soi l'amour, l'Obscurité la folie, et le Froid la haine.

3644. Tous les hommes, dans l'univers entier, ont quant à l'âme, ou, ce qui est la même chose, quant à l'Esprit qui doit vivre après la destruction du corps, une situation ou dans le Très-Grand Homme , c'est-à-dire dans le Ciel, ou hors du Très-Grand Homme, dans l'enfer; l'homme ne le sait pas, tant qu'a vit dans le monde, mais néanmoins il est ou dans le ciel ou dans l'enfer, et c'est de là qu'il est gouverné ; on est dans le ciel selon le bien de l'amour et le vrai de la foi qui en procède, et dans l'enfer selon le mal de la haine et le faux qui en provient.

3645. Le Royaume entier du Seigneur est le Royaume des fins et des usages ; il m'a été donné de percevoir manifestement cette Sphère Divine, à savoir la sphère des fins et des usages, et alors certaines choses qui ne peuvent être énoncées ; de cette sphère découlent et par elle sont gouvernées toutes choses en général et en particulier ; autant les affections, les pensées et les actions ont de cœur en elles-mêmes la fin de bien faire, autant l'homme, ou l'esprit, ou l'ange est dans le Très-Grand Homme, c'est-àdire dans le Ciel ; mais autant l'homme ou l'esprit a de cœur la fin de mal faire, autant il est hors du Très-Grand Homme c'est-à-dire, dans l'enfer.

3646. Il en est des animaux brutes, quant aux influx et aux correspondances, de même que des hommes, c'est-à-dire que chez eux il y a un influx du monde spirituel et un afflux du monde naturel, par lesquels ils sont contenus et vivent ; mais l'opération elle-même se produit diversement selon les formes de leurs âmes, et par suite selon celles de leur corps ; il en est de cela comme de la lumière du monde, qui influe dans les divers objets de la terre en semblable degré et d'une semblable manière, néanmoins elle agit toujours diversement dans des formes diverses, dans quelques-unes elle produit des couleurs belles et dans d'autres des couleurs désagréables ; ainsi, quand la Lumière spirituelle influe dans les âmes des brutes, elle est reçue d'une manière tout à fait différente et par suite les actionne tout autrement que quand elle influe dans les âmes des hommes ; car celles-ci sont dans un degré supérieur et dans un état plus parfait, et sont telles qu'elles peuvent regarder en haut, ainsi vers le ciel et vers le Seigneur, c'est pourquoi le Seigneur peut se les adjoindre, et leur donner la vie éternelle ; mais les âmes de brutes sont telles qu'elles ne peuvent que regarder en bas, par conséquent vers les terrestres seulement, et ainsi être adjointes seulement aux terrestres, aussi est-ce pour cela qu'elles périssent avec le corps : ce sont les fins qui montrent quelle vie a l'homme, et quelle vie a la bête; l'homme peut avoir des fins spirituelles et des fins célestes, et les voir, les reconnaître, les croire et en être affecté, mais les bêtes ne peuvent avoir d'autres fins que des fins naturelles ; ainsi, l'homme peut être dans la sphère Divine des fins et des usages, sphère qui est dans le ciel et qui constitue le ciel ; mais les bêtes ne peuvent être dans une sphère autre que celle des fins et des usages qui sont sur la terre ; les fins ne sont autre chose que les amours, car les choses qu'on aime, on les a pour fins. Si un très grand nombre d'hommes ne savent pas faire de distinction entre leur vie et la vie des bêtes, c'est parce que pareillement ils sont dans les externes, et n'ont du souci et du cœur que pour les choses terrestres, corporelles et mondaines ; et ceux qui sont tels croient aussi que quant à la vie, as sont semblables aux bêtes, et qu'ils seront dissipés comme elles après la mort ; car que peuvent être pour eux les choses spirituelles et célestes, puisqu'ils ne s'en inquiètent point, et ne les connaissent point ? De là cette folie de notre siècle de se comparer aux brutes, et de ne pas voir la différence interne ; mais celui qui croit aux choses célestes et spirituelles, ou qui laisse influer et agir en lui la lumière spirituelle, voit absolument le contraire, et même combien il est au-dessus des animaux brutes : mais, d'après la Divine Miséricorde du Seigneur, a sera traité séparément de la vie des animaux brutes.

3647. Il m'a aussi été montré comment ces choses se passent : il m'a été donné de voir et d'apercevoir quelques esprits nouvellement arrivés dans l'autre vie, qui n'avaient, dans la vie de leur corps, regardé que les terrestres et n'avaient eu rien autre chose pour fin ; as n'avaient pas non plus été initiés dans le bien et le vrai par quelques connaissances, as avaient appartenu à la classe des matelots et à celle des paysans ; ils m'apparurent, ainsi que je l'ai aussi perçu, avoir si peu de vie, que je croyais qu'ils ne pourraient pas, comme les autres esprits, avoir en partage la vie éternelle ; ils étaient comme des machines peu ani-
-mées ; mais les Anges avaient pour eux le soin le plus attentif, et au moyen de la faculté qu'ils avaient comme hommes, ils leur insinuaient la vie du bien et du vrai ; par là ils étaient amenés de plus en plus d'une vie semblable à celle des animaux à une vie humaine.

3648. Il y a même un influx du Seigneur par le Ciel dans les sujets du règne végétal ; ainsi, dans les arbres de tout genre et dans leurs fructifications, et aussi dans les plantes de divers genres et dans leurs multiplications ; si le Spirituel procédant du Seigneur n'agissait pas en dedans continuellement dans leurs formes primitives, qui sont dans les semences, jamais ces arbres ni ces plantes ne végéteraient et ne croîtraient d'une manière et par une succession si admirables ; mais les formes y sont telles qu'elles ne reçoivent rien de la vie : c'est d'après cet influx qu'elles ont en elles une image de l'Eternel et de l'Infini, comme on le voit clairement en ce qu'elles sont dans un continuel effort de propager leur genre et leur espèce, pour vivre ainsi comme éternellement, et aussi pour remplir l'univers ; cet effort est dans chaque semence, mais toutes ces choses, qui sont si merveilleuses, l'homme les attribue à la nature elle-même, et il ne croit à aucun influx du monde spirituel, parce que de cœur il nie cet influx ; cependant, ildoit savoir que rien ne peut subsister que par ce par quoi il a existé, c'est-à-dire que la subsistance est une perpétuelle existence, ou ce qui est la même chose, la production est une continuelle création : que par suite toute la nature soit le théâtre représentatif du Royaume du Seigneur, on le voit, n° 3 483 ;  mais, d'après la Divine Miséricorde du Seigneur, il sera aussi parlé ailleurs des végétaux, et de leur correspondance avec le Très-Grand Homme.

3741. Le Royaume céleste est comme un seul homme, parce que tout y correspond au Seigneur Seul, à savoir au Divin Humain du Seigneur, qui Seul est Homme, n° 49, 288, 565, 1894 ; de ce qu'il y a correspondance, image et ressemblance avec le Seigneur, le Ciel est appelé le Très-Grand Homme; du Divin du Seigneur sont dérivés tous les célestes qui appartiennent au bien, et tous les spirituels qui appartiennent au vrai, dans le Ciel ; tous les Anges y sont des formes, ou des substances formées selon la réception des Divins qui procèdent du Seigneur ; les Divins du Seigneur reçus chez eux sont les choses qui sont appelées les célestes et les spirituels, quand la vie Divine et par suite la Lumière Divine existent et sont modifiées en eux comme récipients : de là vient que même les formes et les substances matérielles chez l'homme sont aussi de même genre, mais dans un degré inférieur, parce qu'elles sont plus grossières et plus composées ; que celles-ci aussi soient des formes récipientes de célestes et de spirituels, c'est ce qui est clairement manifesté par des signes tout à fait visibles, par exemple d'après la pensée qui influe dans les formes organiques de la langue, et produit le langage ; d'après les affections du mental (animus) qui se présentent à la vue dans la face ; d'après la volonté qui par les formes musculaires découle en actions, et ainsi du reste ; la pensée et la volonté qui produisent ces choses sont des spirituels et des célestes, mais les formes ou les substances qui les reçoivent et les mettent en acte sont matérielles ; que celles-ci aient été absolument formées pour la réception de celles-là, c'est évident ; il est donc certain que celles-ci sont dérivées de celles-là , et que si elles n'en étaient pas dérivées, elles ne pourraient pas exister telles qu'elles sont.

3742. Qu'il y ait une vie unique et qu elle vienne du Seigneur Seul, et que les Anges, les Esprits et les Hommes soient seulement des récipients de la vie, c'est ce que m'a fait connaître une expérience si fréquente, qu'il ne m'est pas même resté le moindre doute ; le Ciel lui-même est dans la perception que cela est ainsi, au point même que les Anges perçoivent manifestement l'influx, et comment il y a influx, et aussi quelle quantité et quelle qualité ils en reçoivent ; quand ils sont dans un état de réception plus complet, ils sont dans leur paix et dans leur félicité ; autrement, ils sont dans un état d'inquiétude et dans une sorte d'anxiété : mais néanmoins la vie du Seigneur leur est appropriée, de manière qu'ils perçoivent comme s'ils vivaient par eux-mêmes, et cependant ils savent que ce n'est pas par eux-mêmes : l'appropriation de la vie du Seigneur vient de son Amour et de sa Miséricorde envers tout le genre humain, à savoir en ce qu'il veut se donner à chacun, Lui et tout ce qui est à Lui, et qu'il donne en actualité en tant qu'on reçoit, c'est-à-dire, en tant qu'on est comme sa Ressemblance et son Image dans la vie du bien et dans la vie du vrai ; et comme un tel effort Divin procède continuellement du Seigneur, Sa vie, ainsi qu'il vient d'être dit, est appropriée.

3743. Mais ceux qui ne sont ni dans l'amour envers le Seigneur, ni dans l'amour à l'égard du prochain, ni par conséquent dans la vie du bien et du vrai, ne peuvent pas reconnaître qu'il y a une vie unique qui influe, ni à plus forte raison que cette vie vient du Seigneur ; tous ceux-là sont indignés, et même expriment leur aversion, quand on dit qu'ils ne vivent pas par euxmêmes ; c'est l'amour de soi qui fait cela ; et, ce qui est étonnant, c'est que, dans l'autre vie, quoiqu'il leur soit montré par de vives expériences qu'ils ne vivent point par eux-mêmes, et quoique alors convaincus ils disent que cela est ainsi, néanmoins ils persistent plus tard dans la même opinion, et s'imaginent que s'ils vivaient par un autre, et non par eux-mêmes, tout le plaisir de leur vie périrait, ne sachant pas que c'est absolument le contraire : de là résulte que les méchants s'approprient le mal, parce qu'ils ne croient pas que les maux viennent de l'enfer ; et aussi que le bien ne peut pas leur être approprié, parce qu'ils croient que le bien vient d'eux-mêmes et non du Seigneur. Toutefois, cependant, les méchants, et même les infernaux, sont des formes récipientes de la vie qui procède du Seigneur, mais des formes telles qu'elles rejettent, ou étouffent, ou pervertissent le bien et le vrai ; et par conséquent chez eux les biens et les vrais, qui procèdent de la vie du Seigneur, deviennent des maux et des faux ; il en est de cela comme de la Lumière du soleil, qui, bien qu'unique et resplendissante, est cependant variée à mesure qu'elle passe par les formes ou qu'elle influe en eues ; de là, des couleurs belles et agréables, et aussi des couleurs laides et désagréables.

3744. Par là on peut voir maintenant quel est le Ciel, et pourquoi il est appelé le Très-Grand Homme : ainsi, les variétés quant à la vie du bien et du vrai y sont innombrables , et conformes à la réception de la vie qui procède du Seigneur ; elles sont absolument dans le rapport dans lequel se trouvent dans l'homme les Organes, les Membres et les Viscères, qui tous sont des formes dans une perpétuelle variété recevant la vie de leur âme ou plutôt du Seigneur par l'âme, et cependant, bien qu'elles soient dans une telle variété, elles constituent néanmoins ensemble un seul homme.

3745. Combien est grande et quelle est cette variété, on peut le voir par la variété dans le corps humain ; il est notoire qu'il n'y a pas un seul organe ni un seul membre semblable à un autre; ainsi, l'organe de la vue n'est pas semblable à l'organe de l'ouïe ; il en est de même de l'organe de l'odorat, de l'organe du goût, et aussi de l'organe du toucher qui s'étend par tout le corps ; il en est encore de même des membres, tels que bras, mains, lombes, pieds, plantes des pieds ; de même aussi des viscères, qui sont cachés en dedans, comme ceux qui appartiennent à la Tête, à savoir le Cerveau, le Cervelet, la Moelle allongée et la Moelle épinière, avec tous les petits organes, les petits viscères, les vaisseaux et les fibres dont ils sont composés ; et de ceux qui appartiennent au corps au-dessous de la tête, tels que le Cœur, les Poumons, l'Estomac, le Foie, le Pancréas, la Rate, les Intestins, le Mésentère , les Reins ; et aussi de ceux qui, dans l'un et l'autre sexe, ont été destinés à la génération ; que toutes et chacune de ces choses soient entre elles dissemblables quant aux formes et quant aux fonctions, et si dissemblables qu'elles diffèrent entièrement, cela est connu ; il en est de même des formes au-dedans des formes, elles sont aussi d'une telle variété qu'il n'est pas une seule forme, ni même une seule particule absolument semblable à une autre, à savoir tellement semblable qu'elle puisse, quelque petite qu'elle soit, être mise à la place de l'autre sans quelque altération. Toutes ces choses en général et en particulier correspondent aux cieux, mais de manière que celles qui sont corporelles et matérielles chez l'homme sont célestes et spirituelles dans les cieux ; et elles correspondent tellement, que c'est de là qu'elles existent et subsistent.

3746. En général, toutes les variétés se réfèrent aux choses qui appartiennent soit à la Tête, soit à la Poitrine, soit à l'Abdomen, soit aux Membres de la génération ; et pareillement à celles qui sont Intérieures et à celles qui sont Extérieures, en quelque place qu'elles soient.

3747. je me suis entretenu quelquefois avec des Esprits au sujet des Erudits de notre siècle, sur ce que ces Erudits ne savent que distinguer l'homme en Interne et en Externe, et cela, non d'après la réflexion sur les intérieurs des pensées et des affections chez eux-mêmes, mais d'après la Parole du Seigneur ; et que néanmoins ils ignorent ce que c'est que l'homme Interne ; que de plus, il y en a un grand nombre qui doutent qu'il existe, et qui même le nient, par la raison qu'ils vivent, non de la vie de l'homme Interne, mais de la vie de l'homme Externe ; et que ce qui les séduit beaucoup, c'est que les animaux brutes paraissent semblables à eux quant aux organes, aux viscères, aux sens, aux appétits et aux affections (affectus) : il fut dit que sur de tels sujets, les Erudits en savent moins que les simples, et que néanmoins ils s'imaginent en savoir beaucoup plus ; en effet, ils discutent sur le commerce de l'Ame et du Corps, et, qui plus est, sur l'Ame elle-même pour savoir ce que c'est, tandis que les simples savent que l'Ame est l'homme Interne, et qu'elle est son Esprit qui doit vivre après la mort du corps, et aussi qu'elle est l'homme même qui est dans le corps ; qu'en outre les érudits, plus que les simples, s'assimilent aux brutes, et attribuent toutes choses à la nature, et à peine quelque chose au Divin ; qu'ils ne réfléchissent pas que l'homme a, de plus que les animaux brutes, de pouvoir penser au ciel et à Dieu, et de pouvoir ainsi être élevé au-dessus de luimême, par conséquent être conjoint au Seigneur par l'amour, et qu'ainsi il est impossible que les hommes après la mort ne vivent pas éternellement ; que principalement ils ignorent que toutes et chacune des choses chez l'homme sont sous la dépendance du Seigneur au moyen du Ciel, et que le Ciel est le Très-Grand Homme, auquel correspondent toutes et chacune des choses qui sont dans l'homme, et aussi chacune de celles qui sont dans la nature ; que sans doute, quand ils entendront et liront ces vérites, elles seront pour eux des paradoxes, de sorte que si l'expérience ne les confirmait pas, ils les rejetteraient comme quelque chose de fantastique ; qu'il en sera de même, quand ils entendront dire qu'il y a trois degrés de la vie dans l'homme comme il y a trois degrés de la vie dans les cieux, c'est-à-dire trois cieux, et que l'homme correspond aux trois cieux, de manière qu'il est luimême en image un très petit ciel quand il est dans la vie du bien et du vrai, et par cette vie une image du Seigneur. Au sujet de ces degrés de la vie, J'ai appris que le dernier degré, qui est appelé homme Externe ou Naturel, est celui par lequel l'homme est semblable aux animaux quant aux convoitises et aux fantaisies ; que le second degré, qui est appelé homme Interne et Rationnel est celui par lequel l'homme est au-dessus des animaux, car par ce degré il peut penser et vouloir le bien et le vrai, et commander à l'homme naturel, en répri mant et aussi en rejetant les convoitises et les fantaisies qui en proviennent, et en outre en réfléchissant en dedans de lui-même sur le ciel, et même sur le Divin, ce que ne peuvent nullement faire les animaux brutes ; que le troisième degré de la vie est celui que l'homme connaît le moins, et que cependant c'est celui par lequel le Seigneur influe dans le mental rationnel, d'où vient à l'homme la faculté de penser comme homme, d'où lui vient la conscience, et d'où lui vient la perception du bien et du vrai, et aussi par le Seigneur l'élévation vers Lui : mais ces choses sont loin des idées des Erudits de notre siècle, eux qui se bornent à discuter si une chose est, et qui, tant qu'ils s'en tiennent là, ne peuvent savoir que cette chose est, ni à plus forte raison ce qu'elle est.

3748. Il y avait un Esprit qui, pendant qu'il vivait dans le monde, avait été renommé parmi le vulgaire érudit ; il était d'un génie subtil pour confirmer les faux, et extrêmement grossier quant à ce qui concerne les biens et les vrais ; celui-là s'imaginait, comme précédemment dans le monde, qu'il savait tout, car de tels Esprits croient être très sages , et que rien ne leur est caché ; tels ils ont été dans la vie du corps, tels ils sont dans l'autre vie ; en effet, toutes les choses qui appartiennent à la vie de quelqu'un, c'est-à-dire qui appartiennent à son amour et à son affection, le suivent et sont en lui comme une âme est dans son corps, parce que c'est par ces choses qu'il a formé son âme quant à la qualité : celui-là, qui alors était un Esprit, vint à moi et me parla ; et comme il était tel, je lui demandai : quel est le plus intelligent, celui qui connaît beaucoup de faux, ou celui qui connaît un peu de vrai ? Il répondit : celui qui connaît un peu de vrai ; car il s'imaginait que les faux qu'il connaissait étaient des vrais, et qu'ainsi il était sage : il voulut ensuite raisonner sur le Très-Grand Homme, et sur l'influx de là dans chacune
des choses de l'homme ; mais comme il n'y comprenait rien, je lui demandai comment il comprenait que la pensée, qui est spirituelle, meut toute la face et y présente un portrait d'elle-même, et meut aussi tous les organes du langage, et cela distinctement selon la perception spirituelle de cette pensée ; et que la volonté meut les muscles de tout le corps, et les milliers de fibres qui y sont éparses, pour une seule action, puisque ce qui meut est spirituel, et que ce qui est mu est corporel ; mais il ne savait que répondre. Enfin, je lui parlai de l'effort, lui demandant s'il savait que l'effort produit les actes et les mouvements, et que dans l'acte et le mouvement il y a l'effort pour qu'ils existent et subsistent ; il répondit qu'il l'ignorait ; je lui témoignai donc mon étonnement de ce qu'il voulait raisonner lorsqu'il ne connaissait pas même les principes, et je lui dis qu'il en est alors du raisonnement comme d'une poussière éparse sans aucune cohérence ; les faux le dissipent au point qu'enfin on ne sait rien, et qu'ainsi l'on ne croit rien.

3749. Un certain Esprit vint inopinément vers moi, et influait dans la tête ; les Esprits sont distingués aussi selon les influx dans les parties du corps ; je me demandais tout étonné quel il était, et d'où il venait ; mais après qu'il eut gardé quelque temps le silence, les Anges, qui étaient chez moi, me dirent qu'il avait été tiré d'entre des Esprits chez un érudit vivant encore aujourd'hui dans le monde, qui s'était acquis au-dessus des autres une renommée d'érudition ; alors, par l'intermédiaire de cet Esprit, il me fut aussi donné communication avec la pensée de cet homme; je demandai à cet Esprit quelle idée cet érudit pouvait avoir du Très-Grand Homme, de son influx, et de la correspondance qui en provient ; il me dit quil n'en pouvait avoir aucune : je lui demandai ensuite quelle idée cet homme avait du Ciel; il me dit: aucune, sinon une idée blasphématoire, par exemple qu'on y applaudissait avec des instruments de musique, tels que ceux dont se servent ordinairement les villageois pour produire un son retentissant ; et cependant, cet homme est plus estimé que les autres, et l'on croit qu'il sait ce que c'est que l'influx, ce que c'est que l'âme, et ce que c'est que le commerce de l'âme avec le corps ; peut-être même croit-on qu'il sait mieux que les autres ce que c'est que le Ciel. Par là on peut voir quels sont aujourd'hui ceux qui instruisent les autres, c'est à savoir, que d'après de purs scandales, ils sont opposés aux biens et aux vrais de la foi, quoiqu'ils parlent autrement en public.

3750. Il m'a aussi été montré au vif (ad vivum) quelle idée ont du Ciel ceux que l'on croit être plus que tous les autres en communication avec le Ciel, et avoir de là l'influx : ceux-là apparaissent au-dessus de la tête; ce sont ceux qui, dans le monde, ont voulu être adorés comme des dieux, et chez qui l'amour de soi a été porté au comble par les degrés de la puissance, et au comble par la liberté imaginaire qui en provient ; et qui en même temps sont fourbes sous l'apparence de l'innocence et de l'amour envers le Seigneur ; ils apparaissent en haut au-dessus de la tête d'après une fantaisie d'élévation, mais néanmoins ils sont sous les pieds dans l'enfer : l'un d'entre eux s'abaissa vers moi ; et il me fut dit par d'autres que dans le monde, il avait été Pape ; il me parla très affectueusement, et d'abord de Pierre et de ses clefs, qu'il s'imaginait avoir eues ; mais quand je l'interrogeai sur le pouvoir d'introduire dans le Ciel tous ceux qu'il lui plaisait, il avait du Ciel une idée si grossière qu'il représentait comme une porte par laquelle il y avait introduction ; il disait qu'il l'avait ouverte gratuitement aux pauvres, mais que les riches avaient été taxés, et que ce qu'ils avaient donné était chose Sainte ; lui ayant demandé s'il croyait que ceux qu'il avait introduits y resteraient, il répondit : je ne le sais pas ; sinon, qu'ils en sortent. je lui dis ensuite qu'il ne pouvait pas connaître leurs intérieurs, ni savoir s'ils étaient dignes, que peut-être étaient-ce des brigands dont l'enfer doit être le partage ; il répondit qu'il ne s'en était pas inquiété, que s'ils n'étaient pas dignes, ils pouvaient être chassés ; toutefois, je l'instruisis de ce qui était entendu par les clefs de Pierre, à savoir, que c'était la foi de l'amour et de la charité, et que, comme le Seigneur Seul donne une telle foi, c'est le Seigneur Seul qui introduit dans le Ciel ; que Pierre n'apparaît à qui que ce soit, et qu'il est un simple Esprit, qui n'a pas plus de pouvoir qu'un autre. Ce Pape n'avait sur le Seigneur d'autre opinion que celle-ci, qu'il doit être adoré, en tant qu'il donne un tel pouvoir ; je perçus qu'a pensait que le Seigneur ne devait plus être adoré, s'il ne donnait pas ce pouvoir: enfin, lui ayant parlé de l'Homme Interne, il n'en avait qu'une idée ignoble. Il me fut montré au vif (ad vivum) avec quelle liberté, quelle plénitude et quel plaisir il respirait, lorsqu'il était assis sur son Trône dans le Consistoire, et qu'il croyait parler d'après l'Esprit Saint ; il fut mis dans un état semblable à celui où il avait été quand il siégeait au Consistoire, car dans l'autre vie chacun peut facilement être mis dans l'état de vie où il a été dans le monde, parce que l'état de la vie de chacun lui reste après la mort ; et la respiration de ce Pape me fut communiquée telle qu'il l'avait eue alors ; elle était libre avec agrément, lente, régulière, élevée, remplissant la poitrine ; mais quand il était contredit, il y avait dans l'abdomen, d'après la continuité de la respiration, quelque chose qui semblait se rouler et ramper ; et quand il s'imaginait que ce qu'il prononçait était Divin, il percevait cela par une sorte de respiration plus tacite et comme approbatrice. Il me fut ensuite montré par qui sont alors gouvernés de tels Papes, à savoir par une troupe de Sirènes qui sont audessus de la tête, lesquelles se sont imbues de la nature et de la vie de s'insinuer dans les affections, quelles qu'elles soient, dans le but de commander, et de se soumettre les autres, et de les perdre tous en vue d'elles-mêmes ; la sainteté et l'innocence leur servent de moyen ; elles craignent pour elles-mêmes et agissent avec précaution, mais quand l'occasion se présente, elles se livrent, dans leur intérêt, aux actions les plus cruelles sans aucune miséricorde.