"... cette loi invisible et inconnue qui adapte avec sagesse, intelligence et équité, chaque effet à chaque cause, et qui, par cette dernière, arrive jusqu'à celui qui l'a produite." (Op. cit. p.121)Mme Blavatsky, rappelle-t-il, l'appelle loi de rétribution ; A.P. Sinnet, se fondant sur l'enseignement des "Mahatmas", la nomme loi de la causalité éthique.
Dans cette conception théosophique du "Karma", nous trouvons un excellent exemple de l'abus des termes sanscrits mal compris, que nous avons déjà signalés: le mot "karma" signifie tout simplement "action", et rien d'autre; il n'a jamais eu le sens de causalité ("cause" se dit en sanscrit "Kârana"), et encore moins de cette causalité spéciale dont nous venons d'indiquer la nature" (Op. cit. p. 122)Et d'ajouter aussitôt:
".... l'exposé que nous venons de donner, si succinct qu'il soit, nous parraît suffisant pour montrer le peu de sérieux de la soi-disant doctrine théosophiste, et surtout pour établir qu'elle ne repose, malgré ses prétentions, sur aucune base traditionelle véritable. (Op. cit. p. 122)La pensée de Guénon sur ce sujet est en effet succinte. Dans le reste de l'oeuvre de Guénon, cette notion métaphysique fondamentale n'est abordée qu'en une seule autre occasion: en 18 lignes, dispersées en 3 pages sur les 205 que comportent le corps de L'Homme et son devenir selon le Vêdânta , un ouvrage consacré au "Devenir". On peut admirer l'économie des moyens.
Le deuxième passage où le terme Karma apparaît n'apporte pas grand chose de plus:La première Mîmânsâ (une des six écoles classiques de la philosophie hindoue (les six Darshnas ) est appelée Karma-Mînânsa ou Mîmânsâ pratique, c'est-à-dire concernant les actes, et plus particulièrement l'accomplissement des rites; le mot Karma, en effet, a un double sens: au sens général, c'est l'action sous toutes ses formes; au sens spécial et technique, c'est l'action rituelle, telle qu'elle est prescrite par le Vêda. Cette Mîmânsâ pratique a pour but, comme le dit le commentateur Somanâtha, de "déterminer d'une façon exacte et précise le sens de écritures", mais surtout en tant que celles-ci renferment des préceptes, et non sous le rapport de la connaissance pure ou Jnâna, laquelle est souvent mise en opposition avec Karma, ce qui correspond précisément à la distinction des deux Mîmânsâs. (Op. cit. pp. 17-18)
"... sans la Connaissance, la Béatitude (Ananda) ne peut être obtenue. L'action (Karma, que ce mot soit d'ailleurs entendu dans son sens général, ou appliqué spécialement à l'accomplissement des rites) n'étant pas opposée à l'ignorance (Avidiyâ), elle ne peut l'éloigner." (Op. cit. p. 188)René Guénon prétent donc oblitérer complètement dans le Karma la notion d'effet de l'acte. Ce qui précède est l'entièreté de sa pensée et l'autorise d'accabler de sarcasmes le discours théosophique de Mme Blavatsky, entre autres qui selon Guénon n'a jamais eu aucune base traditionnelle véritable.
" A part certaines doctrines du temps absolu, la loi qui régit l'ensemble temps et histoire est la loi de Karman."
"Karman est d'abord l'acte, puis le résidu de l'acte qui produit des résultats bons ou mauvais (Cf. Brhadâranyaka Upanishad IV, 4, 6.), qui survit à la personne (Cf. Brhadâranyaka Upanishad III, 2, 13, etc...), et finalement, la loi qui régit la rétribution des actes et le réseau des correspondances entre les Karmas des étants. Cette "causalité universelle", comme on a souvent appelé la loi du Karman, explique pratiquement toutes les relations dans l'Univers, et va bien au-delà d'une conception individuelle de la transmigration [réincarnation]".Les cultures et le Temps, p. 73, Paris, Payot-Unesco, 1975
"La réflexion sur le Karman est plutôt une réflexion sur les causes des événements"La notion de Karman selon d'autres auteurs français:(Op. cit. p. 87)
Karman:1. Acte rituel 2. Tout acte, action, oeuvre 3. Travail activité 4. Conséquence des actes 5. Reliquat des conséquences bonnes ou mauvaises à subir pour les actes passés et déterminant les incarnations successives. Jean Herbert et Jean Varenne,Vocabulaire de l'Hindouisme, p. 57, Paris, Dervy-Livres, 1985)
" La théorie des renaissances (samsâra, proprement "circuit", transmigration), avec son corollaire philosophique sur l'acte et l'effet de l'acte (karman), forme, comme on le sait, l'une des bases de l'Hindouisme postvédique"Louis Renou, Anthologie sanscrite, p. 197, Paris, Payot, 1961)
" Les Upanisad et l'hindouisme à leur suite, le bouddhisme et le jaïnisme s'accordent en gros sur la réponse à la question du mécanisme de la transmigration: c'est la valeur morale des actes (karman) accomplis dans une existance qui détermine les conditions de la renaissance, comme elle détermine le bonheur ou le malheur qu'on cannaîtra dans cette nouvelle vie... En somme, le phénomène de la transmigration auquel sont soumis tous les êtres vivants, est régi parce que le bouddhisme appelle "maturation" (vipâka) des actes, sorte de justice immanente qui oblige l'auteur d'un acte à recevoir, automatiquement et inéluctablement, au bout d'un temps plus ou moins long, le châtiment ou la récompense de l'action qu'il a accomplie.Proclamation de Compétence.M.A. Bareau, Nirvana et Samsâra, Encyclopaedia Universalis, vol. 14, p. 823)
Ce n'est pas parce que la "Science Sacrée" a été odieusement caricaturée, dans l'occident moderne, par des imposteurs plus ou moins conscients, qu'il faut s'abstenir d'en parler et paraître, sinon la nier, du moins l'ignorer; - bien au contraire, nous affirmons hautement, non seulement qu'elle existe, mais que c'est d'elle seule que nous entendons nous occuper. Ceux qui voudront bien se reporter à ce que nous avons dit ailleurs des extravagances des occultistes et des théosophistes comprendront immédiatement ce dont il s'agit est tout autre chose, et que ces gens sont à nos yeux que de simples profanes, et même des profanes qui aggravent singulièrement leur cas en cherchant à se faire passer pour ce qu'ils ne sont point...Proclamation d'incompétence.L'Homme et son devenir selon le Vêdânta , p. 10